Les changements d’actionnaires et l’intelligence artificielle bousculent le monde de l’édition


Avis de coup de vent dans l’édition française ? Après trois ans et demi de turpitudes et de rebondissements, le groupe Vivendi de Vincent Bolloré a pris le contrôle du premier groupe français de l’édition, Hachette Livre, également numéro trois mondial. L’industriel breton a dû dire adieu à ses rêves de grandeur puisque la Commission de Bruxelles lui a refusé son projet initial, la création d’un mastodonte issu de la fusion d’Hachette (Grasset, Calmann-Lévy, Stock, Fayard, Hatier…) et d’Editis (Plon, Julliard, Robert Laffont, Nathan…), déjà détenu par Vivendi. Ce dernier a donc dû céder Editis au milliardaire tchèque Daniel Kretinsky.

Les deux plus gros groupes d’édition français changent de mains simultanément. Pour Editis, il s’agit du cinquième propriétaire en vingt ans. Ces mouvements capitalistiques pourraient s’accompagner de changements en profondeur. La réputation qui précède Vincent Bolloré et surtout sa croisade réactionnaire ont de quoi effrayer le personnel d’Hachette et ses auteurs. La mise au pas de ses médias s’est faite au canon, qu’il s’agisse de Canal+, où toute aspérité a été gommée avec la fin des « Guignols », ou de CNews, où a été mise en place la caisse de résonance médiatique d’Eric Zemmour. Au JDD, la boussole politique est désormais fixée à l’extrême droite, au mépris total de l’histoire et de la rédaction de cet hebdomadaire du dimanche.

Rogner sur les « petits livres »

Avec Vivendi aux manettes d’Hachette se profile inexorablement un mercato des auteurs. Déjà les interventions musclées de Nicolas Sarkozy, administrateur de Lagardère (la maison mère d’Hachette), se sont soldées par le départ d’une des grandes éditrices, Sophie de Closets, qui a quitté la direction de Fayard en mars 2022 pour prendre la tête de Flammarion (Gallimard). Emportant avec elle une bonne dizaine d’auteurs historiques, dont la romancière la plus lue de France, Virginie Grimaldi, mais aussi Jacques Attali, Victor Castanet, Alain Badiou, Barbara Cassin… L’ex-chef d’Etat joue les trouble-fêtes chez Hachette en infligeant, encore récemment, des avanies à Olivier Nora, le très respecté patron de Grasset. Quitte à jouer contre le camp de ses amis, Arnaud Lagardère et Vincent Bolloré.

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L’éditrice Martine Saada a déjà délaissé Grasset pour rejoindre Albin Michel en janvier, suivie par ses auteurs, Pascal Quignard, Frédéric Brunnquell ou Anne Berest. Une autre éditrice, Sylvie Delassus, s’apprête à lâcher Stock pour rallier la même maison. Chez Editis aussi, Tatiana de Rosnay, jusqu’alors publiée par Robert Laffont (une filiale du groupe), négocie avec Albin Michel. Ces incertitudes profitent clairement à Madrigall (la maison mère de Gallimard et de Flammarion) et à Albin Michel. Déjà, quand Vincent Bolloré avait acquis Editis, les deux éditeurs de Julliard Betty Mialet et Bernard Barrault étaient partis recréer leur propre maison d’édition sous l’ombrelle de Flammarion (Madrigall). Un exemple qui pourrait faire des émules.

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Catégorie article Politique

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